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NEIGE
NEIGE
Toi qui dans l’ombre as revêtu
Nos routes de ta blancheur vaine,
Maudite neige, ignores-tu
Qu’on m’attend là-bas dans la plaine ?
Sceau jaloux qu’a posé la nuit
Sur mon chemin, peste enjôleuse,
Quel souffle sournois a conduit
Vers mon seuil ta candeur fâcheuse ?
Qu’exulte le gamin frondeur
Dont l’œil pétille et s’illumine,
Et chante qui veut la splendeur
Du mélèze fourré d’hermine !
Jubile, toi, stérile amant
De la beauté morte des glaces
Et des purs cristaux froidement
En tombeaux changeant les crevasses !
Et toi, sectateur ingénu
Des maigres plaisirs de la glisse,
Rêve d’un corps rompu menu
Et d’un nez couleur d’écrevisse !
Moi, je rage et mâche mon frein,
Tant j’aimerais, neige importune,
Que l’ire d’un Râ souverain
Ronge ta croûte et ma rancune ;
Neige intruse, sans toi j’allais
D’un ami cher pousser la porte :
À moi, pelles, râteaux, balais,
Et qu’au diable le vent t’emporte!
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