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CE QUE MOURIR VEUT DIRE (2)
PRÉSENCE
Tant qu’autour de leur nom la bouche
Pose la ferveur des baisers,
Tant que le sang brasse, farouche,
Les sentiments inapaisés,
Tant que la nuit voit leur visage
Sous les paupières s’éveiller,
Tant qu’une larme fait naufrage
Dans la tiédeur de l’oreiller,
Tant que la mémoire bavarde
Ranime leurs pas et leurs voix,
Tant que l’œil au-dedans s’attarde
Sur leurs manières d’autrefois,
Tant que la main vide s’égare
À palper l’ourlet d’un chapeau,
Tant que dans le songe on s’effare
D’encore avoir touché leur peau,
Les morts ne sont pas morts, ils vivent
Au fond de nous, philtres, poisons
Dont les ferments longtemps dérivent
Au bord des mots que nous disons ;
Les morts ne sont pas morts, ils errent,
Sans se plaindre, sans murmurer,
Entre les souvenirs qu’enterrent
Nos cœurs fatigués de pleurer ;
Les morts ne sont pas morts, ils frôlent
De leurs tendres frémissements
Nos vœux, nos soupirs, ils s’enrôlent
Dans les drames de nos serments ;
Les morts ne sont pas morts, leurs rêves
Hantent la nuit des profondeurs
Où nos âmes quêtent des trêves
À leurs impossibles douleurs ;
Les morts vivent pour qui les aime
Malgré le temps et les frimas,
Ils dorment au chaud du poème
Qui redit que tu les aimas.
Tags : mémoire, poème
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