-
UN VILLAGE
Ils disent que tu n’es pas mort,
Mais on a fermé ton école ;
De sa cour plus jamais ne sort
Un chant narquois de carmagnole ;
Son préau clos de verre obscur
N’abrite ni jeu ni rengaine,
Aucun front ne colle à son mur
L’excès d’un rire ou d’une peine ;
Il exhibe un appareil froid,
Récuré jusqu’à l’os des pierres,
Un échafaud rigide y croît
Entre l’acier des étagères.
Ils disent que tu vis toujours,
Mais ton sol vire tout en herbe,
Sans qu’octobre y songe aux labours
Sans qu’un fervent juillet l’engerbe ;
Du penchant qu’il ensoleillait,
On a banni le cep de vigne ;
Près du vallon où l’on cueillait,
L’ancolie au vent se résigne ;
Tes fossés de si frais rasés
Te font un masque funéraire,
De tes sous-bois dûment purgés
Fuit l’églantine téméraire.
Des barrières à tes chemins
Parlent d’absences et de crainte,
De machines au lieu de mains,
Le buis à vif trahit l’empreinte.
Et les nuits d’été quelquefois,
Se peut-il qu’on entende encore,
D’une ferme ou du fond des bois,
Un cri s’enquérir de l’aurore ?
votre commentaire -
NOVEMBRE
Aux volets clos dans le jour qui décline,
Au parasol replié sous l’auvent,
Au jardin glabre, à la treille orpheline,
Au sentier nu que ratisse le vent,
J’ai reconnu l’amère discipline
De votre absence et j’ai vu, s’élevant
Avec la nuit du pied de la colline,
L’oubli vers moi tendre son doigt savant.
Mais sous les feux douteux du crépuscule,
J’écoute au fond de la chair somnambule
Gémir les souvenirs désassemblés,
Et l’œil recru de soleil qui succombe
Fait vaciller le pas devant la combe
Où l’air du soir carde les jeunes blés.
votre commentaire
Suivre le flux RSS des articles
Suivre le flux RSS des commentaires